Il est des personnages qui
n’apparaissent jamais vraiment en pleine lumière mais dont le nom apparaît
régulièrement dès que l’affaire du Mediator ressort. Ceux que des auteurs
appellent les « gourous
de la com » se font rares sur les plateaux de télévision. Ils préfèrent œuvrer en
développant des stratégies d’influence afin de préserver les intérêts de leurs
clients, hommes politiques ou grandes entreprises. C’est le cas de Michel
Bettan, dont on entend la voix rare à l’occasion d’une émission du magazine
Médias sur France 5. Retour sur un personnage trouble.
Le
parcours de Michel Bettan est rapide pour un simple diplômé de l’Université. Né
en 1966, Michel Bettan est titulaire d’une maîtrise du droit des affaires, d’un
diplôme d’études supérieures spécialisées en droit de la construction et de
l’urbanisme. Ni Sciences po, ni ENA. Son ascension dans le milieu des affaires
débute lorsqu’il rejoint le député très actif Gilles Carrez en tant
qu’assistant parlementaire puis comme conseiller particulier de 1993 à 2004. Il
y rencontre les politiques qui comptent, ceux qui pèsent sur les décisions et
qui tissent au quotidien les réseaux de pouvoir. Puis, il rejoint Xavier
Bertrand au ministère de la Santé comme chef de cabinet et conseiller auprès du
Ministre de 2004 à 2007. En 2008 il rejoint la direction de l’UMP, bien coaché
par le très influent Stéphane Fouks, patron puissant et écouté d’Euro RSCG.
Agence d’ailleurs vers laquelle Michel Bettan est exfiltré subitement en
septembre 2010. Car les bruits et les rumeurs du financement de partis
politiques via l’industrie pharmaceutique, et plus particulièrement, par la
CSRP (Chambre
syndicale de la répartition pharmaceutique)
se développent. Il faut sauver le soldat Bettan qui rejoint donc Euro RSCG,
filiale du groupe Havas (Vincent Bolloré) et le pôle « affaires publiques »,
c’est-à-dire, en termes plus clairs, les actions de lobbying. Le poste était
vacant depuis le départ de Bernard Sananès pour EDF au début de l'année 2010. Grâce
à son carnet d’adresses soigneusement entretenu au Ministère de la santé,
Bettan œuvre pour le principal client de l’agence, Sanofi, et soutient le n°1
du médicament dans le développement d’un « buzz santé ».
Sans nul
doute, ce transfert vers Euro RSCG de l’ex-bras droit de Xavier Bertrand sert
les intérêts politiques et personnels du Ministre de la Santé. Pouvoir
s’appuyer sur une très grosse agence de communication peut être utile pour
préparer une ambition politique mais également pour se prémunir de toutes
nouvelles affaires relatives au… Médiator. C’est ici que les relations
Bertrand-Bettan jouent parfaitement leur rôle. Il est notoire que Xavier
Bertrand a besoin de puissants alliés pour se prémunir de toute attaque pour
son rôle dans la gestion de cette affaire Mediator qui risque de perturber son
ascension vers les présidentielles de 2017. En effet, Xavier Bertrand a tout
fait pour charger les laboratoires Servier (voir l’article sur Aquilino Morelle)
puisqu’il était déjà aux affaires en 2006. Le rôle de Bettan chez Euro RSCG est
de pouvoir discréditer toute tentative de sortie honorable des laboratoires
Servier. Le poids d’Euro RSCG, l’influence de Bettan auprès de grands
quotidiens comme Le Figaro ou Libération, l’utilisation du lobbyiste Daniel
Vial, le rassemblement d’alliés objectifs (le député Bapt, Irène
Frachon elle-même) convergent vers une accusation récurrente de Servier, même
sans fondement. Sous un autre angle, il paraît
également évident, que la stratégie développée par Bettan chez Euro RSCG au
service de Bertrand, sert directement ou non, les intérêts de Sanofi qui se verrait
sans doute d’un assez bon œil, mettre la main sur Servier et ses brevets.
Homme de
l’ombre certes, mais pas totalement, puisque Michel Bettan a « reçu la
lumière » le 14 mai 2008 dans la loge Intersection du Grand Orient de
France, connue pour être l’antichambre de grands maîtres et où, Xavier Bertrand
lui-même avait prononcé le 9 avril 2008, une intervention remarquée…
Prochain
chapitre : Daniel Vial