mardi 22 mai 2012

Affaire Mediator : les hommes de l'ombre. Chapitre 8 : Christian Lajoux




Le grand public ne le connaît pas. En revanche, le patron du très puissant groupe d’intérêts LEEM (les entreprises du médicament), Christian Lajoux est incontournable dans l’industrie pharmaceutique. Sa biographie devrait intéresser quand même quelques journalistes, de ceux qui suivent l’affaire Servier et le scandale du Mediator, mais très curieusement, rien ou si peu sur l’action très lobbyiste de cette opaque corporation.
Christian Lajoux a occupé plusieurs fonctions au sein de Sandoz, notamment Directeur de Division, avant de rejoindre Sanofi Winthrop en 1993. Il a ensuite exercé plusieurs fonctions, notamment celle de Directeur des Opérations et de Directeur Général de Sanofi Winthrop France, avant d’être nommé Senior Vice-président France, juste avant la fusion avec Synthélabo en 1999.
Il a occupé cette fonction jusqu’à sa nomination au poste de Senior Vice-président Europe, en janvier 2003, puis à sa fonction actuelle en août 2004. Il est Président du LEEM (les entreprises du médicament) depuis juillet 2006. Depuis 2008, il est Président du Conseil Stratégique France de Sanofi-Aventis.
Christian Lajoux est également Président de la Fédération Française des Industries de Santé (Féfis), administrateur de l’Inserm et de l’Afssaps, membre du Haut Conseil pour l’Avenir de l’Assurance Maladie (HCAAM) et Président de l’IFIS (Institut de Formation des Industries de Santé). Cerise sur le gâteau, Christian Lajoux assure la présidence de Sanofi France. On serait donc en droit de s’interroger sur la présence du LEEM à l’Assemblée nationale, représentée par Muriel Carroll, responsable des affaires publiques et sur les actions de lobbying évidentes envers les élus de la République.
Christian Lajoux préside donc le LEEM, l’organisation professionnelle qui représente les entreprises du médicament présentes en France.  Cette organisation, selon sa propre définition, a pour mission  «de découvrir, produire et mettre à disposition des médicaments et vaccins à usage humain. »  Cette organisation professionnelle «  qui porte les sujets d’intérêt collectif de la profession. Son rôle consiste également à élaborer et à faire respecter l'éthique de la profession, à faciliter les échanges entre ses membres, à établir et à faire vivre des liens avec les autres professions de santé et avec les acteurs de la société, à promouvoir des démarches collectives de progrès, de qualité et de valorisation du secteur. Présidé par Christian Lajoux, le LEEM fédère  près de 270 entreprises adhérentes, qui réalisent plus de 98 % du chiffre d’affaires total du médicament en France, et emploient plus de 100 000 collaborateurs. »
Le fait que Christian Lajoux assure la présidence de Sanofi France ainsi que le LEEM ne choque visiblement personne. Cependant en tant que président du LEEM, Christian Lajoux a promptement réagi lorsque le rapport de l’IGAS fut publié au mois de janvier 2011 accablant le groupe Servier. Trois jours à peine sa diffusion, le patron du LEEM indiquait qu’il « n’était pas inutile que Servier  renonce à un certain nombre de postes importants, comme les présidences de groupe ou la présidence de la commission économique du LEEM ». Le lâchage d’un des plus gros contributeurs du LEEM en dit long sur les enjeux de l’affaire Mediator : « les industriels du médicament sont très préoccupés par la perte de confiance réelle à l’égard des industriels et du système de santé. Nous constatons la déflagration et l’anéantissement des efforts qui ont été faits depuis des années dans la réhabilitation du médicament dans l’opinion a sobrement » commentait Christian Lajoux à l’occasion des vœux du LEEM le 31 janvier 2011. A leur tour, les laboratoires Servier annonçaient leur démission de l’organisation professionnelle estimant « «injustifiée» leur mise à l'écart du LEEM.
Sur le plan politique, au mois de février 2012, Christian Lajoux, dressant le bilan de l’année écoulée, soulignait « sa volonté affichée de maintenir un dialogue permanent avec les autorités (Xavier Bertrand en particulier, le ministre de la santé), et celle de préserver l’attractivité et la compétitivité industrielle de la France ». Évidemment, les esprits perfides pourraient aussi se dire que la disparition à terme des laboratoires Servier laisserait un peu plus de place au géant Sanofi. Mais bien entendu ce ne serait pas politikement korrekt et personne ne pourrait le confirmer…

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