dimanche 22 juillet 2012

Petits scandales entre amis. Chapitre 2 : le Made in France chinois

Les plus grandes marques de luxe françaises se vantent d’être 100% Made in France. Et taisent qu’une partie de leurs produits sont fabriqués en Chine ou ailleurs…


 
Que les touristes roumaines, indiennes ou chinoises qui débarquent à Paris sur les Champs Elysées, les yeux écarquillés devant le luxe français, ne se trompent pas : elles auraient pu acheter leur sac Vicky de chez le Tanneur à Tamil Nadu, Etat du Sud de l’Inde…

Des centaines d’entreprises de vêtements et d’accessoires sont installés à Sibiu en Roumanie : Prada, Ferragamo, Tod’s. Le prix de la main d’œuvre y est particulièrement compétitif et ces entreprises ne sont pas trop regardantes sur les conditions de travail. Louis Vuitton y a installé 600 ouvrières qui assemblent des poignées de sacs ou cirent des bagages pour 16 euros alors qu’il en faudrait 32 en France… La logique économique et le cout du travail français pousse de plus en plus d’entreprises du secteur du luxe à s’installer bien loin des ateliers d’arrière-cour parisiens. Vuitton préfère communiquer sur ces investissements en France que sur ses délocalisations, bien plus avantageuses.

Le sujet est sensible à l’heure du Made in France. Selon une étude de TNS Sofres, 75% des acheteurs de produits de luxe sont sensibles à son lieu de production. Mais rares sont les marques qui assument le fait de faire fabriquer à l’étranger tant le lien est fort entre luxe et lieu de production. L’allemand Hugo Boss reconnait que seuls ses costumes coupés sur mesure sont fabriqués en Allemagne. L’américain Coach, dont les sacs en cuir craquelé se vendent 600 euros pièce, assume la fabrication chinoise. Le joaillier Mauboussin a annoncé que 80% de ses bijoux étaient fabriqués en Chine. Enfin Dolce Gabana met en valeur ses pièces de haute couture fabriquées en Vénétie, mais omet de préciser que ses maillots de bain vendus 154 euros pièces proviennent d’un bouge des faubourgs du Caire.

Aucune loi n’interdit la délocalisation. Le Made in France n’est pas non plus une contrainte puisqu’il suffit que la dernière opération, souvent la plus noble, soit effectuée en France pour que la label soit accordé par les douanes.

Les marques de joaillerie n’échappent pas non plus à cette délocalisation, pressées par une demande croissante de produits de luxe de milieu de gamme. Dior, Boucheron, Chaumet sous-traitent à des entreprises l’assemblage de pièces de joaillerie et ces dernières entreprises n’hésitent pas à délocaliser en Chine : gain de productivité de 50% ! En boutique, la cliente n’y voit que du feu. Chez hermès, 85% de la production est française mais le sellier reconnait faire travailler des Touaregs sur les boucles en métal de ses ceintures. Les craintes sont aujourd’hui multiples devant l’exubérance du ministre du redressement productif, Arnaud Montebourg., qui a repris à son compte le Made in France. Va-t-il durcir les conditions d’octroi de ce label ? Les entreprises françaises vont-elles devoir rapatrier leurs sous-traitances chinoises, marocaines, comme leurs consœurs italiennes employant de nombreux sans papiers en Italie pour garantir un Made in Chinitilay ? Avec un autre inconvénient : une hausse garantie des prix de 20%...

vendredi 13 juillet 2012

Petits scandales entre amis. Chapitre 1 : le prix du baccalauréat



Le Ministère de l’Education Nationale évalue à 50 millions l’organisation de l’incontournable bachot. Il couterait en réalité le double. Le nouveau ministre osera-t-il  affronter les intérêts corporatistes  des enseignants pour réformer cet examen à la française et obsolète ?

Ils sont contents, persuadés d’un avenir radieux. Ils sont catastrophés parce qu’il faut repiquer la terminale. Mais que les lycéens de l’édition 2012 se rassurent, ils seront quand même plus de 80% d’une classe d’âge à réussir, toutes séries confondues.

703 059 inscrits, 5000 sujets concoctés, 180 000 examinateurs et une addition annoncée de 50 milliards d’euros, version officielle par le Ministère de l’Education nationale. Outre les énergies considérables qu’il réclame, l’examen efface du même coup trois semaines d’enseignement de la seconde à la terminale.

Certes, 50 millions c’est dérisoire sur les 62 milliards consacrés à l’enseignement scolaire. Mais en période de crise, la France dépense en moyenne presque 85 euros par candidat. Pour surveiller ces têtes blondes, il faut 180 000 examinateurs qui sont rétribués à la copie corrigée. Xavier Darcos avait revalorisé la correction de copies du bac de 1 à 5 euros. Les primes des chefs de centre d’examen ont été augmentées. Les épreuves orales sont payées quasiment 10 euros de l’heure. Entre 2008 et 2009 la facture totale du bac s’est accrue de 45% en pleine période de toute économique. On comprendra pour quoi aisément des voix s’élèvent pour passer au contrôle continu qui ne couterait presque rien et serait jugé plus juste et moins archaïque que cette météorite anachronique, sophistiquée et frisant le ridicule : ainsi un lycéen peut choisir en option langues vivantes le swahili, le macédonien ou encore l’amharique (langue d’Ethiopie), langues non enseignées dans l’enseignement français… Multiplication des options, nouvelles modalités d’évaluations, création incessante de nouvelles épreuves, le bac pèse lourd pour une étape qui ne fait que se déplacer.

Que ceux qui ont réussi ne se réjouissent pas trop vite. La sélection se fait aujourd’hui en première année d’université, puis la seconde voire en licence. Dans une université lyonnaise de langues, presque 300 étudiants dont 90% d’entre eux ont une moyenne annuelle comprise entre 0 et 5 sur 20. L’illusion républicaine de l’accès au savoir à la peau dure et conduit aujourd’hui à l’errance universitaire. Le bac coute cher, très cher et selon un audit mené en 2005, il s’élèverait à 100 millions d’euros. Vincent Peillon va-t-il oser s’attaquer à la forteresse syndicale et inamovible de l’enseignement secondaire ? Va-t-il oser poursuivre les pistes de réflexions proposées par Luc Chatel qui estimait une institution à bout de souffle ? L’installation d’un contrôle continu bien plus juste et moins anxiogène, pariant sur les progrès constants davantage que sur un coup du sort, serait bien vue même chez les chefs d’établissements. Mais cette réforme entrainerait la suppression de la manne financière des corrections de copies, juste avant les vacances des profs. Or la marge de manœuvre du gouvernement Hollande semble se réduire de semaine en semaine. Le gouvernement Sarkozy avait déjà (comme tous les gouvernements de la V° République) dénoncé les blocages structurels de l’Education Nationale. Comment accepter ainsi de se priver de la base électorale des profs ?