mercredi 15 janvier 2014

Image et "vautours"



Le séisme médiatique et, tout compte fait assez minable et pitoyable d'une presse à scandale, (la parution de photos à priori de François Hollande dans Closer), a généré bien des commentaires inutiles et d'une très inégale qualité. Photos volées, vie privée surexposée, déballages de commentaires mis en télescopage avec l'affaire Dieudionné, autant d'arguties de journalistes en mal d'informations, perdues dans les méandres d'une France qui tente désespérément de retrouver quelques repaires moraux. 

La construction même des images, dont le doute sur leur réalité devrait bénéficier à François Hollande, flou, décadrage, incertitude technique, aurait dû d'abord suggérer la plus grande méfiance sur cette tentative de déstabilisation du Président de la République. L'affaire n'est pas nouvelle et la rumeur devient certitude. L'époque est à l'instantanéité, au spectaculaire, au vite fait, comme si le temps de l'information ne prenait plus le temps d'informer justement.
Face à l'incompréhension de la politique économique de la France, face au malaise grandissant d'un pays qui ne sait plus vraiment dans quelle direction le pouvoir le conduit, rien n'est pire que l'absence d'enquête et de témoignage. Contre l'absence de certitude, contre l'absence de cap, mieux vaut donc n'importe qu'elle image que pas d'image du tout, quelles que soient son ambiguïté, les motivations de Closer, la part d'engagement, de la fascination ou d'une forme de routine consternante. 

Le malaise que nous ressentons après la publication de ces photos (comme d'autres autrefois), tient moins à la réalité qu'elle renvoie qu'à la surenchère de sa rhétorique. Roland Barthes, dans Mythologies et son article sur les photos chocs, écrivait : " le fait surpris éclaté dans son entêtement, dans sa littéralité, dans l'évidence même de sa nature obtuse". L'omniprésence du tout info en continu, l'angoisse quasi existentielle des rédactions à manquer une information, être en retard sur le traitement d'une actualité, conduit, par nécessité, au voyeurisme et à l'absence de discernement. C'est hélas, ce genre de photographies qui fait le tour du monde, et non plus comme autrefois, celle des pires époques de guerre, de famines, de conflits sociaux, celles des situations graves, sérieuses, de ces photographies qui faisaient prendre conscience d'une réalité, capables de mobiliser des populations autour d'une cause. 

La question est donc aussi celle de ce journalisme people, qui se porte très bien, merci. Ce sont ces images futiles qui nous atteignent désormais, fût-ce en forçant nos portes et nos écrans. Mais, comme disait l'autre, nous avons la presse que nous méritons...

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